L’AÏEUL
Le grand père pensif, assis sur son velours,
A l’ombre de la treille aux parfums de muscats,
Ecoute aux champs les bœufs peiner dans les labours
Sous le joug dont le buis gémit à chaque pas.
Sous le vieux béret basque il tire sur sa pipe,
Laissant se dérouler de ses ans l’écheveau,
Sur l’angélus du soir sa laitière anticipe
Pour donner de l’amour et du lait à son veau.
Comme elle, il a nourri, protégé ceux qu’il aime,
Savouré le bonheur de chaque fleuraison,
Bâti des lendemains, baptême après baptême,
Sans un jour manier opprobre et déraison,
Car la terre cathare empreinte de noblesse,
Avec pudeur suggère au sage les propos,
Dont le verbe exprimé parfois avec rudesse,
Ne la blesse jamais et adoucit ses maux…
Et, s’il ressent toujours pour que son âme vive,
De son pays le cœur avec les siens autour,
La fleur d'alexandrin que son sillon cultive
L’enracine un peu plus à ce sol chaque jour.
Alors s’assoupissant, il revoit sa jeunesse,
La colline boisée où fume sa maison,
Et laisse son regard, embué de tendresse,
Vers l’infini couchant se perdre à l’horizon… 20/02/2013